UNION DEPARTEMENTALE DU VAUCLUSE

Rôle des conseillers du salarié

LE CONSEILLER DU SALARIÉ

Le conseiller du salarié joue dans la procédure de licenciement un rôle d'une toute particulière importance. Par delà les considérations strictement juridiques, un licenciement est un événement qui marque profondément la vie professionnelle et personnelle d'un salarié. Mis à l'écart et bien souvent esseulé, le salarié doit être entouré, conseillé pour pouvoir affronter au mieux l'épreuve qui l'attend.

Pour remédier à ces difficultés, le législateur est venu, par la loi n°89-549 du 2 août 1989, modifier l'article L 122-14 du code du travail, permettant ainsi au salarié de se faire assister par une personne de son choix appartenant à l'entreprise lors de sa procédure de licenciement. Mais ce système a très vite montré ses limites dans les entreprises dépourvues de représentants du personnel. Pressions patronales, abattement sur salaire pour la durée de l'entretien, absence de protection accordée aux salariés qui se dévouaient pour aider leur collègue, autant de mesures qui rendaient, en fait, impossible le libre exercice de cette fonction d'assistance. Deux réponses étaient dès lors envisageables pour permettre que le salarié soit tout de même assisté lors de son entretien préalable. La première, portée par la CGT-FO, consistait à supprimer le seuil des 50 salariés nécessaires pour la désignation d'un délégué syndical, et qui aurait permis, pour le salarié, de bénéficier d'une aide « locale », naturellement au fait des problématiques de l'entreprise et, pour son défenseur, d'être placé dans une situation moins contraignante. Mais cette solution, qui aurait par ailleurs permis d'étendre la présence des syndicats aux petites et moyennes entreprises, n'a pas été retenue par le législateur. Il lui a été préférée une seconde réponse, consistant à autoriser la présence d'une personne extérieure à l'entreprise, nommée « assistant » en 1989 et aujourd'hui connue sous la dénomination de « conseiller » du salarié. La CGT-FO continuera à militer pour qu'aboutisse sa revendication et que tous les salariés puissent, sans distinction, bénéficier d'une présence syndicale dans leur entreprise. Mais, même si l'institution n'est pas parfaite, même si elle impose bien des contraintes, le besoin d'assistance du salarié, lui, demeure. Cette problématique doit rester au coeur de notre action. Le conseiller du salarié existe et reste la seule arme dont nous disposons pour soutenir les salariés dans les entreprises dépourvues d'institutions représentatives du personnel. C'est pourquoi il importe que les conseillers du salarié FO soient épaulés par les instances syndicales, afin de pouvoir exercer au mieux cette importante fonction, et formés pour qu'ils aient pleinement conscience du rôle qui leur est dévolu, mais aussi des droits et de la protection qui leur sont accordés dans l'exercice de leur mission.

Andrée Thomas Secrétaire Confédérale

I. Conseiller du salarié, les contours de la mission

Le conseiller ne peut, du fait de la loi, intervenir dans toutes les entreprises et pour tous les licenciements – les licenciements économiques d'au moins 10 salariés sur une période de 30 jours étant exclus, la loi n'ayant dans ce cas pas prévu d'entretien préalable au licenciement. Sa fonction est supplétive et, de ce fait, les conseillers ne pourront être appelés à intervenir que dans les petites entreprises (moins de 11 salariés) ou dans les entreprises plus importantes mais ne disposant pas d'institutions représentatives du personnel.

Le conseiller du salarié pourra intervenir par trois fois lors de la procédure de licenciement et sera, lors de chacune de ces étapes d'autant plus efficace s'il agit, avec l'accord du salarié, en étroite collaboration avec l'UD.

A) Avant l'entretien préalable

Le conseiller peut, dans l'exercice de sa mission, rencontrer le salarié lors d'un pré-entretien afin d'obtenir les informations nécessaires au bon déroulement de la rencontre avec l'employeur: exposé détaillé des faits, motif du licenciement envisagé, accord collectif applicable, ou plus généralement toute information utile. Le conseiller pourra par ailleurs prodiguer quelques conseils et veiller à ce que le salarié ne commette, par mégarde, une quelconque erreur face à son employeur. Ce préentretien devra se dérouler, sauf accord de l'employeur, hors des locaux de l'entreprise.

B) Pendant l'entretien préalable

L'employeur est en droit de demander au conseiller de justifier de sa qualité. Celui-ci devra donc veiller à garder avec lui la copie de l'arrêté préfectoral et l'attestation individuelle sur laquelle figure sa photo, au risque, en cas d'oubli, de voir le salarié privé de son soutien.

L'entretien préalable est l'étape où le rôle du conseiller est le plus important. Chargé d'une mission de conseil et d'assistance, le conseiller apaise les débats, veille au respect des droits du salarié et le soutient. Mais son rôle ne s'arrête pas là et loin d'être un simple témoin passif, le conseiller peut questionner l'employeur, participer à la discussion en demandant des précisions ou en présentant des observations. Il pourra par ailleurs prendre librement des notes, dresser un procès-verbal voire, si l'employeur donne son accord, enregistrer l'entretien. Toutes ces pièces pourront constituer des éléments de preuve dont le juge appréciera librement la valeur et la portée. Ces éléments seront toutefois plus probants s'ils sont contresignés par l'employeur. C'est pourquoi il est préférable de mettre au point une véritable stratégie pour obtenir cette contre-signature, en s'accordant, par exemple, par avance et par écrit sur les modalités de validation du procès verbal et/ou de l'enregistrement.

Si l'employeur lui refuse l'accès à l'entreprise ou entrave le bon exercice de sa mission – impossibilité de prendre des notes, d'intervenir dans les débats – le conseiller pourra lui rappeler que l'assistance au cours de l'entretien est un droit pour le salarié dont la violation est sanctionnée par le code du travail comme un vice dans la procédure de licenciement et sur le plan pénal. Lorsqu'il est rattaché à FO, le conseiller n'est plus une simple personne extérieure, il porte avec lui le savoir-faire syndical en matière de défense du salarié. L'employeur doit être conscient que derrière le conseiller, c'est le syndicat lui-même qui vient au renfort du salarié et qui veille au respect du droit dans son entreprise.

C) Après l'entretien, lors d'un éventuel contentieux avec l'employeur

Le conseiller peut, après l'entretien, continuer à agir en faveur du salarié. Il pourra tout d'abord, transmettre son procès-verbal au salarié ou à son défenseur, ou encore venir témoigner devant le conseil de prud'hommes, leur apportant ainsi l'information ou les pièces qui pourront, peut-être, faire pencher la balance. Mais il pourra aussi abandonner sa fonction de conseiller pour revêtir celle de défenseur du salarié au cours d'une instance prud'homale et ainsi le défendre devant le Conseil de prud'hommes.

II. Conseiller du salarié, un statut, des droits, une protection

A) L'acquisition, l'exercice et la perte du statut de conseiller du salarié

a) Devenir conseiller du salarié

Devenir conseiller est un acte militant. C'est en partie ce qui explique que la majorité des conseillers soit d'origine syndicale. La liste des conseillers, établie par le DDTE après consultation des syndicats représentatifs au plan national, est arrêtée par le préfet. Seuls les salariés exerçant des fonctions de conseiller prud'homme sont exclus du dispositif.

b) L'exercice de la fonction de conseiller

Être conseiller du salarié impose certaines contraintes, au-delà des efforts demandés pour exercer la fonction. Le conseiller ne doit en aucun cas outrepasser son rôle lors de l'entretien, en exerçant par exemple un quelconque pouvoir de contrainte ou de contrôle ou en abusant de sa liberté d'expression – injures, menaces, etc. Il devra par ailleurs respecter une obligation de discrétion à l'égard des informations représentant un caractère confidentiel et données comme telles par le chef d'entreprise. Enfin, le conseiller sera tenu au secret professionnel pour toutes les questions relatives aux secrets de fabrication, la violation de cette obligation pouvant engager sa responsabilité pénale.

c) La perte du statut de conseiller du salarié

Le conseiller est libre, à tout moment, de renoncer à l'exercice de sa fonction. Cette liberté s'exprime aussi dans l'exercice de son mandat puisqu'il lui sera possible, pour des raisons personnelles, de refuser de prêter assistance à un salarié. Mais le conseiller peut aussi être déchu de sa fonction, suite par exemple à des refus systématiques d'assister les salariés, à une violation du secret professionnel, de l'obligation de discrétion ou à une sortie délibérée et répétée du cadre fixé par les textes lors de sa mission d'assistance. Il appartient dans ce cas à la DDTE, après convocation du conseiller, de proposer au préfet de radier le conseiller de la liste. L'acte de radiation, comme tout acte administratif, est contestable devant le juge administratif.

B) Les droits accordés au conseiller

Le salarié dispose, pour exercer efficacement sa fonction, d'une protection et d'un statut juridique particuliers:

a) Le conseiller est protégé contre la rupture de son contrat de travail

Le conseiller du salarié dispose d'une importante garantie: l'exercice de sa mission ne peut être une cause de licenciement. Cet interdit rend nul tout licenciement contrevenant à cette disposition. En outre, il ne peut être licencié sans autorisation préalable de l'inspecteur du travail, et ce même s'il est encore en période d'essai. Cette autorisation devra également être demandée dans le cas où l'employeur souhaiterait tirer les conséquences d'un refus par le « conseiller-salarié » d'une modification de son contrat ou de ses conditions de travail. La protection joue tout au long de son mandat et perdure, pendant l'année qui suit la cessation de ses fonctions, si le conseiller a exercé pendant au moins un an.

Le conseiller du salarié titulaire d'un CDD dispose lui aussi d'une protection. Si l'employeur entend rompre le contrat avant échéance du terme pour faute grave ou envisage de ne pas de renouveler le contrat qui comporte une clause de report de terme, celui-ci devra saisir l'inspecteur du travail pour obtenir son aval. A l'échéance du terme, le lien contractuel ne cessera qu'après constatation par l'inspecteur du travail que le salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire. Il faut enfin noter qu'en aucun cas le salarié n'est dans l'obligation d'avertir son employeur de son inscription sur les listes.

b) Le conseiller bénéficie d'une autorisation d'absence

L'employeur, dans les établissements où sont occupés au moins 11 salariés, est tenu de laisser au salarié investi d'une mission de conseiller le temps nécessaire à l'exercice de sa fonction, dans la limite d'une durée maximale de 15 heures par mois. Le temps de l'entretien, du pré-entretien – si bien sûr celui-ci précède l'entretien, des trajets aller et retour (retour vers le domicile ou vers le lieu de travail, selon les cas) s'imputeront sur ce contingent. Les heures attribuées au conseiller pourront se cumuler avec celles dont il bénéficie du fait d'éventuels autres mandats.

A contrario, le « salarié-conseiller » exerçant dans une entreprise de moins de 11 salariés ne pourra donc pas, sauf accord de son employeur, s'absenter durant son temps de travail.

Dans un cas comme dans l'autre, le conseiller est bien sûr libre d'exercer sa fonction hors de son temps de travail.

c) Les absences du conseiller sont rémunérées, les frais y afférents compensés

Le conseiller du salarié exerce bénévolement son activité. Toutefois ses absences, si elles ont lieu pendant ses heures de travail, devront être rémunérées par l'employeur, celui-ci pouvant par la suite obtenir le remboursement auprès de l'Etat des salaires, ainsi que des avantages et charges sociales y afférents.

Le temps passé hors de l'entreprise sera assimilé à du temps de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés, du droit aux prestations d'assurances sociales et aux prestations familiales et des droits que le salarié tient du fait de son ancienneté.

Enfin, le conseiller pourra, selon certaines modalités, se faire rembourser directement par l'Etat les frais de transport et de repas engagés dans le cadre de sa mission.

d) Le conseiller peut bénéficier d'une indemnité forfaitaire

Le conseiller du salarié qui a effectué au moins 4 interventions dans l'année civile peut, depuis 1997, bénéficier d'une indemnité forfaitaire annuelle, dont le montant s'élève depuis 2001 à 40 euros.

e) Le conseiller dispose d'un accès prioritaire à la formation Le conseiller du salarié dispose, du fait de son statut, d'un droit particulier à être formé. Le droit du travail est un droit complexe, dense et en constante évolution. Le conseiller, pour exercer sa mission, doit pouvoir se former et s'informer. A ce titre, la loi oblige l'employeur, si le conseiller en fait la demande, à lui accorder des autorisations d'absences pour suivre une formation, dans la limite de deux semaines (12 jours) par période de trois ans suivant la publication des listes. Le salarié puisera, pour les besoins de sa formation, sur son « congé formation économique social et syndical » (L451-1 C.Trav).

f) Le conseiller bénéficie d'une protection sociale pour l'exercice de sa mission Le conseiller du salarié est protégé pendant l'exercice de sa mission contre les risques accidents du travail, de trajet et maladies professionnelles. La circulaire n°91-16 du 5 septembre 1991 précise que le salarié ne sera couvert par le régime des accidents de trajet, lorsqu'il utilise son véhicule personnel, que s'il a préalablement obtenu auprès de la DDTE l'autorisation d'en faire usage.

Important: Le statut de conseiller du salarié est protégé pénalement. L'article L.152-1 du code du travail dispose que quiconque porte ou tente de porter atteinte à l'exercice régulier des fonctions de conseiller du salarié, notamment par la méconnaissance des dispositions liées à son statut protecteur pourra se voir condamné à une peine d'emprisonnement d'un an et/ou à 3750 euros d'amende.

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